L’Église des Yvelines se penche sur sa diversité
(Reportage publié par La Croix) Les premières assises de l’« Église métisse » ont eu lieu, lundi 10 juin, à Trappes pour réfléchir sur la manière de mieux vivre et mettre en valeur la diversité des catholiques du diocèse de Versailles. Par Arnaud Bevilacqua (à Trappes)
À Trappes, le défi de la diversité est une « aventure de tous les dimanches ». Le père Étienne Guillet a recensé 45 nationalités (RD-Congo, Sénégal, Cap-Vert, Inde, Sri Lanka, Portugal,…) à la messe dans l’église Saint-Georges. La commune populaire des Yvelines était donc le lieu idoine pour accueillir les premières assises de l’« Église métisse ».
Une Église, reflet des différentes vagues de migrations
Cet événement s’est tenu lundi 10 juin, en présence du préfet des Yvelines, Jean-Jacques Brot, et de l’évêque auxiliaire du diocèse de Versailles, Mgr Bruno Valentin. Il a vu le jour à l’initiative d’un groupe composé de prêtres, diacres et laïcs, qui souhaite mettre en valeur la diversité de l’Église des Yvelines, reflet des différentes vagues de migrations en France.
Ce collectif, fondé par le père Thierry de Lastic avec l’accord de l’évêque de Versailles, mène depuis plus d’un an une réflexion autour du « métissage culturel et spirituel » que l’on observe dans un certain nombre de paroisses, notamment dans les quartiers populaires. Une charte a déjà été publiée en mars 2018.
« Compte tenu de différentes influences, – culture ambiante sécularisée et relativiste, religions traditionnelles, islam – et de celle du christianisme évangélique dont l’expansion nous interroge, – nos pratiques pastorales doivent évoluer afin de permettre le plein déploiement de certains traits culturels et spirituels de catholiques issus de l’immigration », est-il notamment souligné.
Lors de cette journée, brièvement perturbée par l’intrusion de cinq jeunes militants se présentant comme défenseurs de la « chrétienté » hostiles à l’immigration, à l’islam et au pape, il s’est agi de dépasser le simple constat d’une réalité pour proposer des pistes d’actions. Et de participer plus largement à une prise de conscience de l’Église, qui n’est pas que « bourgeoise et élitiste » selon les mots de Denis Allard, un laïc de Louveciennes, et membre actif du groupe.
Des voix que l’on entend peu dans l’Église
Près de 150 personnes, venues de Trappes, des Mureaux, de Sartrouville ou d’ailleurs dans les Yvelines, ont pu échanger et discuter sur la manière de mieux appréhender la diversité ethnique et culturelle. Comment l’Église des Yvelines peut se laisser bousculer par ces catholiques issus de l’immigration ? Des voix que l’on entend peu dans l’Église, parmi les catholiques venus d’Afrique notamment, ont pu s’exprimer.
Les débats, souvent animés, ont tourné autour de la liturgie, du catéchuménat ou encore de l’accueil des migrants.
Chants en différentes langues lors de la messe, chorale multiculturelle, entrain des célébrations, place des jeunes, équipes de catéchuménat qui reflètent la diversité,…Tous ces points ont été abordés pour que les paroisses multiculturelles puissent vivre ensemble avant de pouvoir témoigner de leur unité à l’extérieur. Dans des villes populaires où la présence de l’islam est forte, la minorité catholique a un rôle à jouer pour le dialogue et la paix sociale.
Cette diversité est incontestablement source de dynamisme : comme l’affirme le groupe de réflexion, « environ la moitié des baptisés adultes à Pâques sont issus de l’immigration » dans le diocèse. Mais Mgr Valentin souligne également qu’elle constitue « un défi complexe à relever qui n’est pas gagné d’avance ». Il a également assuré que, dans ce domaine, l’Église avait « longtemps péché par angélisme » mais la capacité de vivre ensemble est, selon lui, la « clé de sa crédibilité ». Ces assises doivent ainsi déboucher sur des propositions concrètes qui seront transmises au diocèse avant sans doute d’imaginer la tenue de nouvelles assises élargies.
Arnaud Bevilacqua, La Croix